par Marie ORDENER | 13 janvier 2018 | Économie, Société, TBS Press
« J’ai plus de batterie ». Phrase super malheureuse, mais surtout phrase que l’on entend un peu trop fréquemment. Il faut dire que quand ton téléphone passe à 20% de batterie disponible alors que tu l’as chargé toute la nuit et qu’il est seulement 10h du matin…il y a de quoi devenir rapidement épuisé. Surtout quand ledit téléphone a à peine 2 ans et qu’il t’a coûté plus de 500 euros.
Et si ce n’était que les téléphones…Le problème, c’est que l’obsolescence programmée touche tous les objets électroménagers et électroniques (c’est pour ça que ta mère pète un câble quand sa machine à laver tombe en panne après seulement 3 ans d’utilisation et que tes grands parents lâchent des « c’était mieux avant »…).
Mais alors…c’est quoi l’obsolescence programmée ?
L’obsolescence programmée est l’ensemble des techniques utilisées pour réduire la durée de vie ou d’utilisation d’un matériel pour en augmenter son taux de remplacement. En gros pour faire simple, c’est quand les entreprises jouent sur la composition de leurs produits pour qu’ils tombent plus rapidement en panne et qu’on rachète du matériel neuf (acheter, acheter, toujours acheter…).
Le terme d’obsolescence programmée apparait dès 1932, et c’est un promoteur américain, Bernard London, qui le définit le premier. Ce dernier voulait que le gouvernement américain instaure une législation positive à propos de l’obsolescence, afin de stimuler et maintenir la consommation. Bon, à cette époque, ses idées n’avaient pas vraiment été reprises politiquement.
Et pourtant, dix ans plus tard, en 1942, le célèbre économiste Joseph Schumpeter instaure le principe de « destruction créatrice » et le décrit dès lors comme le fait d’« inculquer à l’acheteur le désir de posséder quelque chose d’un peu plus récent, un peu meilleur et un peu plus tôt que ce qui est nécessaire » (comme quand tu veux acheter le super IPhone X alors que tu as déjà le 8).
Donc pour faire court, l’obsolescence programmée ça fait bien longtemps que ça existe et ça n’a jamais été un sujet tabou !
Les exemples les plus symboliques d’obsolescence programmée qui vous feront dire « ah mais oui ! »
Nombreux sont les exemples de produits touchés pas l’obsolescence programmée. Vous en avez peut-être d’ailleurs un entre vos mains en ce moment même. Mais au-delà des exemples les plus classiques (comme quand ton IPhone ne veut plus télécharger de mise à jour), il existe aussi des exemples tout à fait surprenants.
Depuis quelque temps, les fabricants d’imprimantes sont accusés d’installer des puces dans leurs machines, afin qu’elles se bloquent au bout d’un certain nombre d’impression ou qu’elles indiquent à tort qu’il n’y a plus d’encre pour que l’utilisateur change la cartouche. Et pourtant, ces pratiques sont bel et bien interdites en Europe.
Et pour ces mesdames pas spécialement indignées par l’histoire des imprimantes, sachez que si la plupart de vos collants se filent dès la première ou deuxième utilisation, ce n’est pas votre karma. Pour tout vous dire, lorsque les bas nylons furent mis en vente dans les années 1940, le produit rencontra un énorme succès, mais les collants étaient tellement résistants que la croissance du produit sur le marché était limitée. Du coup, les entreprises décidèrent de modifier la composition de leur produit pour qu’ils soient plus facilement filables (et donc que le consommateur en rachète rapidement).
La lutte contre l’obsolescence programmée
Pour commencer, il faut dire qu’en France, depuis 2015, une loi existe afin de sanctionner les entreprises qui utilisent l’obsolescence programmée. En effet, les constructeurs sont passibles de 2 ans de prison et de 300.000 euros d’amende si une pratique d’obsolescence est prouvée. Mais pour les experts, sanctionner n’est pas la solution. A la place, il faudrait plutôt créer des labels et des certifications pour inciter les constructeurs à agir correctement et sensibiliser les consommateurs au moment de l’achat. Les trois solutions aujourd’hui proposées par les gouvernements seraient de contraindre les constructeurs à indiquer la durée de vie de leurs produits, de développer des incitations fiscales mais aussi de mettre en place un label réparabilité (qui éviterait de tout jeter dès qu’une pièce dysfonctionne).
Mais il est aussi possible, en tant que consommateur de privilégier des marques qui luttent contre l’obsolescence programmée et qui sont éco-responsables. Ces marques spécialisées (Patagonia, Fairphone,..) restent cependant assez peu nombreuses et il est donc bien difficile pour le consommateur de trouver des produits encore non intoxiqués par cette obsolescence programmée…
par Marie ORDENER | 1 décembre 2017 | Économie, Politique, Société, TBS Press
Tu viens de terminer 3 ou 4 belles mais intenses années à Toulouse Business School. Fraîchement diplômé, il est maintenant nécessaire de trouver le plus rapidement possible un job (n’oublions pas qu’un prêt étudiant attend d’être remboursé…). Si certains trouvent facilement du travail après des stages fructueux en France, d’autres (et ils sont souvent nombreux) se tournent vers l’international. Depuis le début déjà, TBS (comme la plupart des grandes écoles de commerce) oblige ses étudiants à partir un ou deux semestres à l’étranger, que ce soit en campus ou en université partenaire. Les retours de ceux qui rentrent pour terminer leurs études sont souvent positifs, et ils voient déjà d’ailleurs se profiler à l’horizon un nouveau départ hors de France dès qu’ils auront leur diplôme en poche.
Mais alors pourquoi ce si grand attrait pour l’étranger, et surtout, pourquoi ce désamour des jeunes pour la France au moment de trouver leur premier poste ?
Le phénomène est relativement récent en France (environ une décennie), et pourtant le nombre de jeunes diplômés qui quittent le pays à la fin de leurs études ne cesse d’augmenter (+1,7% en 2016).
Les motivations de ces départs sont pour la plupart similaires : retrouver un pays ou une ville dans laquelle on a évolué et où l’on s’est senti intégré et à sa place, retrouver notre bien-aimé rencontré un an auparavant et resté sur place, l’ouverture du marché du travail dans certains domaines (on pensera à Londres pour la finance,…), sans oublier les salaires qui sont bien plus attrayants à l’étranger (environ 45.000 euros par an pour un jeune manager à l’étranger, contre 37.000 euros par an en France, à formation égale). Beaucoup évoquent « un système trop fermé», la « peur d’échouer en France », « le besoin d’internationaliser le CV » ou encore « l’envie de changer d’air et de découvrir de nouvelles choses en entreprise ». On comprend donc que l’envie de partir vers de nouveaux horizons soit plus forte que celle de rester…
Mais si « l’herbe est plus verte ailleurs », cette fuite des cerveaux n’est-elle pas un problème pour la France ?
Et oui, toi jeune TBSien, tu t’inquiètes pour ton pays d’origine et te demande comment notre économie peut, ou pourra, survivre à la fuite de ton cerveau et de ceux de tes potes vers des destinations exotiques et des salaires plus attrayants ! Pas de panique, d’autres se sont déjà penchés sur le sujet, et ont montré que les départs français sont souvent compensés par l’arrivée de jeunes étrangers (grâce à des programmes d’échanges comme Erasmus) et par le retour au pays d’expatriés de longue date, qui reviennent en France pour des raisons personnelles ou professionnelles. Cependant, n’oublions pas que les avis restent mitigés, et que la France enregistre pour l’heure plus de départs que d’arrivées.
Un retour au pays difficile ?
Après être parti faire le tour du monde pendant quelques années, vient l’heure de rentrer en France pour de nombreux expatriés. Mais bien souvent, les retours sont difficiles voire insurmontables car les démarches administratives sont pour la plupart très longues. Par exemple, il faut parfois un an pour avoir une situation régulière auprès de la sécurité sociale, ou des complémentaires de santé…
Alors que d’autres pays comme le Canada accueillent à bras ouverts leurs revenants, nous avons encore de nombreux progrès à faire pour permettre à ceux qui le veulent de rentrer (souvent accompagnés d’un/une conjoint(e) étranger(e) et parfois même de petits marmots à la double nationalité)… Il n’est donc pas difficile de comprendre pourquoi ils sont encore peu nombreux à revenir, d’autant plus que l’accueil qu’ils reçoivent n’est pas toujours des plus chaleureux, la France n’ayant pas une culture profondément migrante.
par Admin TBS DSI | 11 avril 2016 | Économie, Politique, TBS Press
Mercredi 06 avril au soir, Emmanuel Macron a lancé un mouvement politique à ses initiales : « En Marche ». Depuis Amiens, sa ville natale, le ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique a présenté son projet devant quelques 200 personnes, sans même inviter les journalistes. Surprenant, quand on sait que l’évènement a été largement repris depuis dans les médias, avec comme point d’orgue le passage du ministre au journal télévisé de France 2 ce dimanche. D’après l’intéressé, le mouvement compterait d’ores et déjà 13 000 membres à cette date, et enregistrerait un nouvel adhérent toutes les 30 secondes – soit près de 3000 nouveaux adhérents par jour.
Conclusion du teaser faisant la promotion du mouvement
Un mouvement hors du clivage gauche/ droite ?
« C’est un mouvement politique qui ne sera pas à droite, qui ne sera pas à gauche » a affirmé le ministre, qui soutient vouloir « refonder par le bas, de manière authentique » le lien entre les Français et la politique. Ainsi, le mouvement est ouvert à tous, aux adhérents du Parti Socialiste comme aux adhérents des Républicains.
Le teaser du mouvement annonce vouloir remédier aux « blocages économiques qui font que l’ascenseur social est en panne ». En fait, le mouvement se veut être le prolongement de la vision politique d’Emmanuel Macron, résolument libérale, et ce à tout point de vue. C’est en effet à partir de la notion de liberté, « primat essentiel » selon lui, qu’il formalise ses idées politiques. L’idée de liberté se décline ainsi sur le plan économique sous la forme d’un libéralisme assumé, tout en s’accompagnant de politiques en faveur de l’égalité des chances. En ce sens, le mouvement réunit bien deux approches qui appartiennent l’une à la droite, l’autre à la gauche. On notera que cette approche rappelle à de nombreux égards la position adoptée par Justin Trudeau, l’actuel Premier ministre canadien.
Ainsi, s’il se dit bien « être de gauche, venir de la gauche », Emmanuel Macron entend se donner les moyens de travailler avec des gens de droite, de « rassembler les bonnes volontés de droite et de gauche, […] de créer une dynamique pour que les progressistes puissent se retrouver ». Les réactions à l’annonce de la création du mouvement sont à ce titre révélatrices, puisque François Hollande ou Najat Vallau-Belkacem ont salué le projet, quand Jean-Pierre Raffarin ou Pierre Gattaz faisaient de même.
La finalité du mouvement en question
Ce positionnement qui prétend s’affranchir d’une distinction nette entre droite et gauche – à l’heure où 45% des Français disent ne plus en tenir compte – ne prépare vraisemblablement pas un éventuel gouvernement de coalition. Rappelons que cette configuration de coalition n’a eu lieu qu’en de très rares occasions : en 1926 avec l’Union nationale de Poincaré, puis dans le cadre du Gouvernement provisoire du général de Gaulle (quand bien même « lors de moments de crise, ce type de coalition a bien fonctionné », ainsi que le rappelle Jean Garrigues, professeur d’Histoire à Sciences Po Paris).
Aussi, si la possibilité de formation d’un gouvernement de coalition semble tout à fait lointaine, à quelle échéance la création du mouvement a-t-elle l’intention de répondre ? A partir des nombreux commentaires portant sur ce sujet, deux hypothèses se dessinent. En premier lieu, on soupçonne bien sûr le mouvement d’être une rampe de lancement pour l’élection présidentielle de 2022. Emmanuel Macron n’ayant jusque-là jamais été élu, n’étant pas même adhérent du Parti Socialiste, l’initiative semble d’abord être le signe manifeste que le ministre s’assume désormais comme un homme politique à part entière, et non plus seulement comme un haut-fonctionnaire de renom.
D’autres voient dans ce mouvement une manière pour le ministre de jouer les rabatteurs pour François Hollande, en allant chercher des électeurs au centre tout en sachant que François Hollande tentera vraisemblablement de se positionner en point d’équilibre de la gauche. Emmanuel Macron s’en défend, sans avoir les moyens d’en faire la démonstration. Après analyse, on devine bien sûr que les deux hypothèses présentées ici ne sont pas exclusives l’une de l’autre, et que dans son intention l’initiative joue très certainement sur les deux tableaux.
Concernant la seule ambition présidentielle du ministre, celui-ci affirme ne pas en faire une question centrale, rebuté qu’il serait par l’ « efflorescence de candidats » qu’on constate en cette période de primaires. Difficile de lui donner tort sur ce point. Et de poursuivre : « Ça n’est pas une aventure solitaire. Je ne suis pas obsédé par la comédie humaine, où la vie des gens ne devient qu’un décor. […] Le plus important c’est d’essayer de faire œuvre utile pour le pays ». On ne demande qu’à y croire.
Sylvain
par Admin TBS DSI | 16 décembre 2015 | Économie, Politique, TBS Press
Devenu ministre de l’Economie à 36 ans, Emmanuel Macron est le plus jeune ministre de l’Economie que la France ait connue depuis Valéry Giscard d’Estaing (nommé Ministre de l’Economie et des Finances en 1962). Emmanuel Macron est sans aucun doute une figure montante de la gauche. C’est à ce titre qu’il a semblé être utile – ou tout du moins intéressant – de faire une courte synthèse à son propos. Il s’agit bien sûr d’abord de donner à voir qui il est, en examinant son parcours, avant de présenter quelles sont les grandes idées auxquelles il adhère.
Une trajectoire atypique
Né en 1977, Emmanuel Macron grandit à Amiens. Il est le fils de deux médecins, son père étant neurologiste au CHU d’Amiens, quand sa mère est médecin-conseil de la Sécurité sociale. Sa grand-mère, ancienne principale de collège, est une femme de gauche. Emmanuel Macron lui-même explique que c’est à son contact qu’il s’est imprégné des valeurs de la gauche. Sur le plan scolaire, c’est un bon élève, qui pratique par ailleurs le piano de manière assidue.
Rien de très étrange dans tout cela direz-vous. Sauf que voilà, à 16 ans, il tombe amoureux de sa professeur de français, Brigitte Trogneux. « Emmanuel Macron lui écrivait tout le temps des poèmes » rapporte ainsi un ancien camarade de classe. Inquiets, ses parents l’envoient à Paris, où il intègre le lycée Henri IV dès la terminale. Il y poursuit ses études en prépa B/L, avec un goût bien plus affirmé pour les matières littéraires que pour les mathématiques, car Emmanuel Macron est d’abord un littéraire. Peut-être aussi son goût pour les livres se confond-il en partie avec ce qu’il ressent toujours pour son ancienne professeur de français, dont le souvenir ne le quitte pas.
Il poursuit ensuite ses études en Philosophie à l’université de Nanterre, avant de devenir l’assistant de Paul Ricœur de 1999 à 2001. Emmanuel Macron aide alors le philosophe dans l’écriture d’un livre de réflexion sur l’Histoire : La mémoire, l’histoire, l’oubli. Dans le même temps, Emmanuel Macron est étudiant à Sciences Po Paris, où il prépare le concours de l’ENA, qu’il réussit en 2002. Il est intéressant de noter que l’ENA n’est devenu un objectif que tardivement, après ses études de philosophie. Là aussi il se distingue : lui-même le reconnaît, il ne s’y prédestinait pas.
Après l’ENA, il travaille quelques années à l’Inspection Générale des Finances, avant de travailler un an avec Jacques Attali, de 2007 à 2008, dans le cadre de la Commission pour la libération de la croissance française (plus connue sous le nom de Commission Attali). A cette occasion, il se spécialise dans les questions proprement économiques. Impressionné par sa capacité de travail et par son acuité – ainsi qu’il le dit lui-même – Jacques Attali fait alors rentrer Emmanuel Macron chez Rothschild comme banquier d’affaires.
C’est également en 2007 qu’Emmanuel Macron épouse son ancienne professeure de français, de vingt ans son aînée, déjà mère de trois enfants issus d’un premier mariage, et même grand-mère. A cette occasion, lui qui avait fait le choix de ne pas avoir d’enfants pour se consacrer à sa carrière devient de fait grand-père par alliance. La situation est singulière ; elle surprend toujours, choque parfois. Néanmoins, force est de constater que si ce choix de vie a certainement eu un lien avec le goût d’Emmanuel Macron pour la littérature, aujourd’hui la vie privée du ministre n’a aucune incidence sur son action politique.
Pour un libéralisme de gauche
Dans une interview accordée au Wall Street Journal, Emmanuel Macron confiait : « [Quand on est banquier], d’une certaine manière, on est comme une prostituée. Le boulot, c’est de séduire ». Alors, Emmanuel Macron, grand banquier ? Pas vraiment. Le passage par le privé fait d’une certaine manière partie de la formation de tout énarque ; on oublie par exemple que peu avant de faire passer la loi sur les 35 heures en tant que Ministre du Travail, Martine Aubry passe deux ans au sein du groupe industriel Pechiney (de 1989 à 1991) où elle assiste le PDG du groupe, qui devient ensuite le président du CNPF (l’ancien Medef). Imaginez un peu si Macron avait travaillé pour Pierre Gattaz avant de devenir ministre… Emmanuel Macron n’hésite d’ailleurs pas à dire combien son passage chez Rothschild lui est utile en tant que ministre de l’Economie – ce qu’on imagine sans peine.
Par ailleurs, Emmanuel Macron est un libéral convaincu ; ou plutôt, il aime raisonner comme ses maîtres à penser, que sont Elie Cohen et Philippe Aghion. Ces deux économistes défendent une approche libérale de l’économie, tout en soutenant être de gauche. Philippe Aghion, aujourd’hui professeur au Collège de France après avoir longtemps travaillé à Harvard, explique ainsi que selon lui tout repose sur l’innovation. Il parle à ce propos d’économie de la disruption, pour désigner cette nouvelle ère, ce nouveau paradigme. Pourtant, pour que l’innovation puisse prendre toute sa place, il s’agit selon lui non pas de taxer lourdement le capital pour ensuite réinvestir l’argent collecté comme le défend Thomas Piketty, mais de créer « une bonne législation qui encourage la concurrence » ; et c’est bien ce à quoi Emmanuel Macron s’est employé avec la loi dite « loi Macron », avec par exemple la libéralisation du secteur des autocars, faisant alors concurrence aux autres moyens de transport.
Naturellement, il est alors permis de s’interroger : comment être de gauche dans un cadre de pensée qui soit aussi résolument libéral ? Philippe Aghion, qualifié de « parrain de la Macronomie » par le Nouvel Observateur, donne à voir comment le Ministre de l’Economie concilie son adhésion au libéralisme avec les grands principes de la gauche auxquels il dit lui-même adhérer. Philippe Aghion explique :
« Il faut que chaque individu, à chaque stade de sa vie, puisse rebondir, que l’accès à la santé et à l’éducation ne soit jamais un problème. Il faut que la mobilité sociale réconcilie croissance et inégalités et pour cela il faut lutter contre les poches de pauvretés, éviter les phénomènes d’exclusion vers le haut comme vers le bas, réformer le marché du travail et faciliter la concurrence sur le marché des biens et des services. C’est cela, pour moi, être de gauche ».
On le comprend, il s’agit de libéraliser dans le sens d’une concurrence accrue, tout en protégeant les individus contre les risques liés à cette même concurrence, avec en toile de fond la lutte contre les inégalités par une politique permettant la mobilité sociale.
Philippe Aghion, économiste, professeur au Collège de France après avoir enseigné pendant 15 ans à Harvard
Ce cadre de pensée permet de mettre en perspective les récentes déclarations du ministre. Une semaine après les attentats du 13 novembre, il affirme ainsi que « la disparition de l’idéal de mobilité sociale » est le « terreau » sur lequel le djihadisme a pu se développer. « Nous sommes une société dont au cœur du pacte il y a l’égalité » défend-il alors. Cette réaction à chaud s’inscrit bien sûr dans le cadre évoqué précédemment ; d’ailleurs, Emmanuel Macron fait alors immédiatement le lien avec les enjeux économiques. Il parle ainsi de la nécessité de « changer cette société en l’ouvrant », c’est-à-dire de la nécessité selon lui de libéraliser l’économie tout en renforçant la mobilité sociale. Il poursuit : « Je pense que ce sont les fermetures dans notre économie, dans notre société, […] qui créent de l’inefficacité sur le plan économique ».
On le constate, Emmanuel Macron est un vrai libéral, quand bien même il déclare avoir des convictions fermement ancrées à gauche. En fait, il est convaincu d’utiliser les outils économiques les plus efficaces à sa disposition, pour ainsi faire œuvre de pragmatisme tout en agissant en conformité avec ses convictions. C’est le même esprit qui prévaut pour la loi qu’il prépare, dite « loi Macron 2 », portant sur les « Nouvelles opportunités économiques » (NOE). Résolument moderne, Emmanuel Macron déclare vouloir adapter l’économie française aux transformations qui la traversent, étant désormais acté que 47% des emplois sont menacés par la numérisation – en premier lieu les professions intermédiaires (ce sont par exemple les comptables, les secrétaires, le personnel médical).
Du philosophe au politique
Travailleur, pragmatique, d’accord. Mais qu’en est-il de son ambition personnelle, du destin présidentiel que Jacques Attali lui prédit depuis déjà plusieurs années ? Le ministre présente un détachement surprenant par rapport à cette question ; « comme si chez lui le philosophe n’avait pas encore tout à fait cédé la place au politique », note un journaliste. Ainsi, quand on lui demande s’il pense parfois à devenir un jour Président de la République, il répond, amusé :
« C’est fou cette question, vous avez dû la poser à tous les hommes politiques à mon avis. Moi, j’ai vu trop d’hommes politiques consumer leur vie, et leur présent, à penser à l’étape d’après, et du coup n’être jamais dans leur vie. J’ai vu trop de gens malheureux de cela, trop de gens passer à côté de leur vie pour cela, et sans doute trop de Français déçus de gens comme ça. »
A l’en croire, Emmanuel Macron serait suffisamment détaché de toute ambition présidentielle pour ne pas se laisser dévorer par elle. C’est à voir. Philosophe ou homme politique, peut-être faut-il choisir.
Sylvain
par Admin TBS DSI | 4 août 2015 | Économie, Société, TBS Press
OptiMiam, je l’avais évoquée dans un
précédent article sur le gaspillage alimentaire comme un exemple de l’utilité des nouvelles technologies pour lutter contre des problèmes de société. L’application propose de dénicher des produits non vendus à prix discount dans des magasins locaux. Pour l’instant présente principalement à Paris, c’est un excellent moyen d’éviter le gaspillage en faisant des économies en simplifiant la rencontre entre vendeur et consommateur.

Recommandée par Polytechnique par l’ambassade des États-Unis à Paris, Raodath Aminou, co-fondatrice de la société, a été invitée au sixième GES à Nairobi. L’événement a été créé par le président Obama et vise notamment à favoriser la créativité et l’entrepreneuriat. En quelques années, le sommet est devenu un haut lieu de networking et permet à des start-ups innovantes d’acquérir une visibilité hors normes. OptiMiam a donc fini deuxième du concours « spark the fire » derrière efishery, start-up indonésienne qui offre un dispositif intelligent pour nourrir les poissons (dans un cadre professionnel, pas pour vos poissons rouges évidemment), un très beau score pour une start-up qui commence à grandir.
En plus de cette visibilité qui a permis d’acquérir de nouveaux investisseurs, Raodath Aminou peut dès lors envisager une exportation prometteuse à l’international. Avec un prix à la hauteur de 14 000$ il ne fait aucun doute que la start-up a de beaux jours devant elle !
À noter que l’entreprise recherche un stagiaire
business development, du coup si vous aimez les secteurs innovants, dynamiques et citoyens, c’est le moment ! N’hésitez à faire tourner auprès de vos amis qui seraient intéressés.
Camille Barbry
par Admin TBS DSI | 17 janvier 2015 | Économie, Géopolitique, TBS Press
« Peu importe qu’un chat soit blanc ou noir, s’il attrape la souris, c’est un bon chat » : c’est au pragmatisme de l’un des pères fondateurs du développement économique de l’Empire du Milieu, Dèng Xi?opíng, que les entreprises occidentales devraient se référer lorsque leurs volontés les poussent à s’introduire sur le marché chinois. Via des stratégies protectionnistes reposant sur des montages juridico-financiers saupoudrés d’une bonne dose de contrôle politique, la Chine a instauré des barrières visant à soutenir ses propres multinationales au détriment des géants occidentaux. Cependant, la doxa aurait tort de considérer la Chine comme un pays fermé ou plutôt renfermé. Au contraire, la République Populaire de Chine reste ouverte… sous ses conditions.
Rien de mieux pour illustrer ces propos que d’évoquer Facebook qui depuis 2009 souffre d’une interdiction de ses activités en Chine continentale, ce qui profite largement à son concurrent chinois « WeChat » (ou « W?ixìn) détenu par l’entreprise Tencent. La suspension de 5années contre le réseau social comptant plus d’un milliard d’utilisateurs n’a rien d’étonnant. En effet, celui-ci est jugé non-conforme aux réglementations en vigueur par les autorités car il ne permet pas un contrôle de la diffusion des informations. Facebook fut officiellement sanctionné aux côtés de Google et Youtube à la suite des violences ethniques qui ont eu lieu à Ürümqi, la capitale du Xinjiang au nord-ouest de la Chine, durant l’été 2009 où plus de 150 personnes furent tuées sans compter le millier de blessés. Cependant, on retiendra surtout que Facebook, au cours de sa période de forte expansion autour de 2010 aurait pu venir s’accaparer un marché laissé quasiment à l’abandon par les entreprises chinoises (WeChat ayant vu le jour en 2011 par exemple).
Après 5 ans de purgatoire, Mark Zuckerberg et ses équipes comptent bien revenir en force sur ce marché de 632 millions d’internautes. C’est pourquoi Facebook intensifie ses efforts envers le pouvoir à coup de courbettes et de gestes habiles. Dès mai 2014, le réseau social a ouvert un bureau en plein cœur du centre des affaires de Pékin dans le but de montrer sa volonté de coopérer et sa docilité. D’ailleurs, l’activité développée dans les locaux de la capitale chinoise bien que lucrative, ne se résume qu’à la vente d’espaces publicitaires à des annonceurs chinois voulant acquérir plus de visibilité à travers le globe. Plus récemment en octobre, nous avons pu voir Mark Zuckerberg se prêtant au jeu des questions/réponses, en mandarin s’il vous plait pendant plus d’une trentaine de minutes lors d’une conférence donnée à la meilleure université chinoise, celle de Tsinghua où le jeune directeur possède un siège au Conseil d’Administration. L’idée de séduire la future élite du pays n’est pas neutre, elle est même plutôt astucieuse sur le long terme. De plus, ni le directeur de Facebook ni ses équipes n’ont pris la liberté de se plaindre de la situation de leur réseau social dans le pays ; au contraire le Vice-Président du développement de Facebook Vaughan Smith s’est même dit « satisfait » de la situation.

Néanmoins la plus remarquable des courbettes est signée Mark Zuckerberg lors de la visite dans les locaux californiens de Facebook de l’un des grands dignitaires du parti communiste chinois, L? We?, le chien de garde choisi par Xí Jìnpíng pour veiller sur le système de censure Internet le plus développé au monde. En effet, le président du géant du web s’est volontiers fait photographier aux côtés de son invité (voir photo) avec le recueil « La gouvernance de la Chine » posé nonchalamment sur son bureau : un pavé de 515 pages comprenant l’ensemble des discours, citations, interventions du président chinois. Les joues enflammées de Lu Wei ne trompent pas ; Facebook est prêt à faire de nombreuses concessions pour se faire accepter et passer au travers des barrières érigées par Beijing. Plus encore, Mark Zuckerberg est allé jusqu’à acheter ce livre à ses collaborateurs pour qu’ils puissent comprendre « le socialisme aux caractéristiques chinoises » : un prosélytisme apprécié. Ces courbettes ne font que justifier et légitimer la censure orchestrée par Xí Jìnpíng. Ce comportement représente l’acceptation d’un Facebook prêt à se plier aux normes chinoises tout en clamant être le défenseur de liberté d’expression en Occident : la schizophrénie affichée par la firme américaine n’étonne cependant plus après les révélations des liens entre les services secrets américains et cette dernière.
Cependant, est-ce vraiment suffisant pour amadouer l’Etat-parti ? En septembre, L? We? a déclaré que Facebook « ne pourrait pas » gagner l’accès au marché chinois dans un avenir proche. De plus, ce dernier a renchéri par une attaque subtile et indirecte lors du « World Economic Forum » à Tianjin : « Si vous essayez d’effriter les intérêts de la Chine […] nous ne vous autoriserons pas à exister ! ». Plus récemment, ce même ministre de la censure, responsable de la supervision de l’internet en Chine, a affirmé « Je n’ai pas dit que Facebook ne pourrait pas entrer en Chine mais je n’ai pas dit qu’il pourrait ». Des paroles ambiguës, peu encourageantes mais qui ont pour mérite de ne pas fermer la porte à l’entrée de Facebook en Chine. Toutefois, quelques facteurs encourageants comme la fantastique réussite de Linkedin au sein de l’Empire du Milieu, acceptant ouvertement la censure et le filtrage sur son réseau, laissent Facebook rêveur.
Néanmoins, même si un jour ses courbettes bien que chronophages permettaient à Facebook de décrocher le fameux sésame lui permettant de s’attaquer au marché chinois, le site de Mark Zuckerberg pourrait-il véritablement rivaliser face à un rival de la taille de WeChat, si bien installé dans le paysage et fort de ses 400 millions d’utilisateurs en Chine ? De plus, en cas d’introduction du réseau social Facebook, le pouvoir chinois pourrait-il malgré des restrictions fortes vraiment contrôler un univers si permissif et si vaste ? Des interrogations persistent quant à l’avenir de Facebook en Chine, bien malin sera celui qui pourra prédire l’avenir de ce duo.
Finalement, un phénomène récent pourrait bien venir bousculer l’ordre établi. Malgré le blocage du réseau social, celui-ci reste tout de même accessible via des réseaux privés virtuels en Chine. L’attrait d’un nombre croissant de jeunes chinois sympathisants à Facebook permet au réseau d’infiltrer ce marché petit à petit… jouant sur l’effet boule de neige propre aux réseaux sociaux, on en vient à se demander si le gouvernement de Xí Jìnpíng serait en mesure d’endiguer une telle tendance.
Jordane Decas
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