Quand les femmes prennent les armes


Publié le 26 mars 2021

« L’homme doit être élevé pour la guerre et la femme pour le délassement du guerrier : tout le reste est folie. » Voilà ce que fait dire Nietzsche à Zarathoustra. Depuis la nuit des temps, les hommes expriment leur courage, leur vertu et leur virilité sur le champ de bataille, en mourant dignement pour défendre les siens. Nous pouvons aisément citer des hommes ayant brillé par leur génie militaire : Alexandre le Grand, Jules César, Napoléon, Charles de Gaulle… Pourtant, quand il s’agit de citer des femmes ayant brillé par leurs prouesses militaires, c’est un peu plus compliqué. En effet, bien que les femmes aient brillé dans divers domaines (artistique, littéraire, scientifique), les exploits des hommes sur le front ombragent ceux de leurs homologues féminines dans des conflits. C’est pourquoi, je me propose humblement de mettre à l’honneur trois femmes. N’en déplaise à Nietzsche, les femmes ne sont pas uniquement destinées au « délassement du guerrier ».

Laskarina Bouboulina, l’héroïne grecque

Née le 11 mai 1771 à Constantinople, Laskarina se marie une première fois à 17 ans. Veuve en 1797, elle se remarie en 1801 avec D. Bouboulis, un homme fortuné. Ce dernier prend part à la guerre russo-turque (1806-1812) mais meurt lors d’un assaut de pirates. Elle hérite alors d’une somme. Elle aurait pu alors couler des jours heureux dans l’insouciance, à élever ses six enfants. Elle décide pourtant de rejoindre la révolution grecque afin de libérer le pays du joug ottoman. Elle finance la construction de quatre navires dont l’Agamemnon, un imposant navire de guerre achevé en 1820. Elle organise également ses troupes et leur procure matériel et armement. Le 13 mars 1821, douze jours avant le début officiel de la guerre d’indépendance, elle hisse le premier drapeau révolutionnaire sur son mât. Le 3 avril, elle joint ses forces à une flotte coalisée de 300 navires. Bien qu’elle ait alors déjà plus de 50 ans, elle participe aux batailles. Voilà ce que l’historien Ioannis Filimon relate à son propos : « À côté d’elle, les indécis devenaient forts, et les courageux se retiraient devant elle. Inspirés par la bravoure de Bouboulina, les troupes sous son commandement libèrent plusieurs villes et à prennent la forteresse solidement fortifiée de Palamidi à Nauplie, ville qui sera temporairement la capitale de la Grèce. Bouboulina est tuée le 22 mai 1825, lors d’une vendetta familiale. Ses efforts n’ont pas été vains car la Grèce obtient son indépendance 5 ans plus tard. A titre posthume, le titre honorifique d’amiral de la marine russe ainsi que le grade de contre-amiral de la marine de guerre hellénique lui son décernés pour son génie militaire.

Maria Oktiabrskaïa et la petite amie combattante

Pendant la Seconde Guerre mondiale, environ 800 000 femmes ont servi dans l’Armée rouge. Certaines étaient reléguées aux fonctions d’appui en seconde ligne, d’autres se retrouvaient au cœur de l’action. Maria Oktiabrskaïa faisait partie de ce deuxième groupe. Née en 1905 dans une famille modeste de la Crimée, elle se marie en 1925 avec un officier soviétique. Elle s’intéresse alors à la vie militaire : elle reçoit une formation d’infirmière, apprend à utiliser des armes et à des véhicules. Sa vie bascule en août 1941 : son mari meurt au champ d’honneur à Kiev lors de l’invasion de la Wehrmacht. Les communications étant assez irrégulières à cette époque, elle apprend la triste nouvelle deux mois après. Elle n’a dès lors qu’une obsession : venger son mari. Elle vend tous ses biens afin d’acheter un char T-34 pour 50 000 roubles. Ce n’est pas inhabituel pour l’époque, mais Maria fait ce don à deux conditions : elle veut baptiser et conduire son char. Elle formule cette demande à Staline en personne, qui accepte. Chose rare pour l’époque, Maria bénéficie d’un entraînement complet pendant cinq mois, alors que la plupart des tankistes étaient envoyés directement au front. Elle devient ainsi pilote et mécanicienne. Son char, baptisée « la petite amie combattante » a été envoyé à Smolensk pour anéantir la résistance allemande. Lors de l’assaut, le char est endommagé et contrevenant aux ordres de ses supérieurs, Maria sort du char et le répare sous le feu ennemi. Cet exploit force l’admiration de ses camarades masculins et lui vaut l’obtention du grade de sergent. Un mois plus tard, à Vitebsk, l’épisode se répète : elle parvient à réparer son char endommagé sous le feu ennemi. Pas mal, non ? Mais l’offensive de Leningrad-Novgorod marque la fin de sa (brillante !) carrière. Maria et son équipage balaient alors les tranchées et détruisent des positions allemandes. Mais son T-34 est touchée pour la troisième fois. Ses chenilles ont un problème et Maria sort alors du char pour les réparer. Cette fois-ci, elle est touchée. Elle perd connaissance et reste dans le coma pendant deux mois. Elle succombe à ses blessures le 15 mars 1944. Néanmoins, son T-34 lui survit : dans le chaos de la bataille, Maria avait réussi à réparer ses chenilles. Qui a dit que la guerre et la mécanique n’étaient qu’une affaire d’hommes ?

Mariam al-Mansouri, la terreur des djihadistes

Nous sommes en septembre 2014. Mariam al-Mansouri alors âgée de 35 ans est pilote de l’armée de l’air des Émirats arabes unis. Elle participe aux premières frappes aériennes menées en Syrie par la coalition internationale contre l’organisation de l’État islamique (EI). Les autorités du pays ne démentent ni ne confirment sa participation aux raids anti-EI du 23 septembre. Une source émiratie indique néanmoins que Mariam al-Mansouri a « non seulement piloté un avion, mais a commandé une escadrille » lors de ces opérations. Coup dur pour les djihadistes : selon les croyances répandues au sein de l’EI, le fait d’être tué par une femme leur fermerait les portes du paradis où – rappelons-le – 72 vierges les attendent. (Certains affirment que l’EI n’accorde que peu d’importance au sexe de leur ennemi.) Quoiqu’il en soit, Mariam représente tout ce que l’EI abhorre. En effet, la pilote émiratie est intervenue plusieurs fois à la télévision pour plaider en faveur de ses compatriotes de sexe féminin à servir leur pays, y compris dans l’armée. Des propos qui n’ont pas manqué de susciter la haine des sympathisants de l’EI. Voici le portrait de trois femmes qui, à leur manière et à leur échelle, ont marqué l’Histoire. Les femmes sont-elles peu nombreuses dans l’armée ? Peut-être. Sont-elles valorisées ? Pas assez. Mais nul doute : quand elles prennent les armes, elles savent se montrer à la hauteur !     Lien de la photo : https://fr.wikipedia.org/wiki/Valkyrie#/media/Fichier:Valkyrie_(Peter_Nicolai_Arbo)_-_Nationalmuseum_-_18255.tif Par J.P Castorix

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