Texte des Orgi’Arts sur la mousse


Publié le 22 mars 2015

La mousse est la chose la plus légère du monde. Même l’éther, quintessence parmi les essences, ne peut rivaliser face à cette substance bullesque. Chaude ou froide, bouillante ou frigorifiante, la mousse mousse dans tous les cas. Qu’elle sorte d’un goulot, d’un tube ou d’un verre, elle rafraîchit, rebondit, mystifie les êtres inanimés.

Lorsque la mousse est moussaka, elle nourrit, redonne force aux Spartiates, qui, une fois sustentés, courent facilement un marathon en apnée. La mousse apparaît dans toutes les étapes de sa préparation en moussaka. Une fois les aubergines cueillies, de la mousse odorante et goûteuse jaillit de la fraîche blessure. Puis, de la mousse apparaît à la commissure des nervures des feuilles une fois frites dans une poêle tefal. C’est encore la mousse qui apparaît dans la bouche de l’ingurgitant gargantuesque de cette moussaka chaude et moelleuse, qu’il tient en apesanteur devant lui. Ainsi la mousse apparaît et disparaît tout au long du processus.
Sur le pont d’un navire, les voiles massives claquent au vent, et la coque fend l’eau soumise, projetant là encore de la mousse laiteuse et fragile sur les versants. Joyeuse, elle bondit et se mue de masse sans vie à une tourbillonnante matière qui virevolte dans les airs avant de disparaître et de réapparaître un peu plus loin, juste à l’endroit de contact de la coque et de la mer. Depuis la hune, l’œil vif et perçant des moussaillons considèrent la mousse comme la seule chose qui les unit au monde. Insignifiante mais essentielle, elle permet aux marins de se rendre compte que le bateau court sur les flots et prévient les marins de la folie.
La mousse est le souffle magique qui fait se mouvoir les visages. C’est elle qui donne à une personne son âme, ses expressions, ses mimiques et son genre. Frissonnant les cheveux, faisant s’onduler les doux poils soyeux de la barbiche, la mousse donne le caractère aux trait. Elle façonne les expressions, fait tourbillonner les idées à l’intérieur du cerveau. La mousse transporte, elle fait s’émoustiller l’humain. Masse compacte, jaillissante, joyeuse, la mousse surprend et assure la cohésion entre psychique et physique.
Nonobstant ce constat positif et heureux, la mousse est une matière également malicieuse et parfois destructrice. Voici la mousse sortant du canon de pistolet. Provoquant la mort, elle fait corps avec la fumée. La mousse est ici noire et grimaçante. On retrouve son passage dans les résidus noirs et poudreux une fois la fusillade terminée. La mousse est responsable de nombreux duels, et de la mise en terre de quantité de mousquetaires.
            Malgré tout, rien n’est plus pur que la mousse. Sortant d’un tuyau fait de chair pour se retrouver dans une cave, elle aussi, faite de chair, elle s’immisce dans tous les interstices et se répand à gauche ou à droite, cela dépend. Elle commence alors son périple dans un canal resserré, long et plein de dangers. Arrivée à son but, elle percute un ovale resplendissant et merveilleux. Une fois insérée dans cet ovale, la vie commence et de la mousse réapparaît aux bordures de la cave abondante 9 mois plus tard.

 

            La mousse est donc la sixessence universelle et invisible. Changeante, n’apparaissant que par intermittence et toujours avec discrétion, elle donne la vie, présente la mort, mais, avant tout, fait tourner la roue de l’existence et met en place la motricité de la Nature. C’est la mousse qui donne le la de la vie, qui fait tout vivre et donne l’impulsion à la vie. Belle est la mousse, d’où la volonté de certaines personnes de se faire mousser.
Les Orgi’Arts
Antoine Lezat

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.