La transidentité, un phénomène méconnu


Publié le 23 janvier 2015

 

 

Au début de l’année, Facebook a offert la possibilité de choisir parmi 52 variations autour du genre sur son profil, dépassant ainsi la double notion masculin/féminin. Si le concept n’existe pas en France et que la démarche peut sembler très anglo-saxonne, elle pose le doigt sur un problème largement ostracisé : le décalage entre sexe biologique et genre psychosocial. Le conseil européen vient ainsi d’accoucher d’un rapport conséquent sur la situation des enfants transgenres, ces enfants qui affirment très tôt appartenir à un genre différent de son sexe.
Au-delà des standards

 

Le suicide de Leelah Alcorn, jeune transgenre américaine, a ramené sous les projecteurs la question des transgenres et de leurs souffrances. Phénomène bien connu aux États-Unis avec entre autres les pink boys, ces jeunes garçons qui aiment s’habiller en fille, la question est bien plus opaque en Europe où elle touche entre 2 et 7% des moins de 12 ans. Ces enfants sont souvent victimes d’une société normée et conformiste. La dualité de l’identité sexuelle, avec pour chacune un rôle prédéfinie a un effet profondément rassurant, mais elle fait naître un profond mal-être social.
Victimes de moqueries ou d’incompréhension, ils sont rarement soutenus par le corps enseignant, leurs camarades ou même leurs parents. 40 à 50 % tentent de mettre fin à leur vie à un moment ou à un autre, ils font donc partie des populations les plus aptes à développer dépressions et névroses lourdes. Leelah Alcorn avait par exemple été contrainte par ses parents à subir un traitement de réorientation sexuelle (également appelée thérapie de reconversion). Datant de l’époque où l’homosexualité était considérée comme une maladie mentale, elle est aujourd’hui encouragée par les groupes fondamentalistes religieux.
Une situation d’autant plus difficile à supporter que les clichés sont tenaces et la majorité de la population reste opaque aux questions de genre. Un transgenre n’est pas forcément homosexuel, pas plus qu’il ne rejette forcément totalement son sexe biologique. De même, être transgenre a été retiré des maladies mentales et n’est donc plus considéré comme une anomalie. Malgré cela, il demeure courant que certains médecins tentent de soigner ce qu’ils considèrent comme une déviance et de faire rentrer leur patient dans la norme.
La transidentité est finalement particulièrement rejetée car elle ne fait que révéler l’esprit profondément limitatif de la société et la vision très binaire de l’existence à laquelle la société se conforme.

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Quelles solutions ?

 

Vous l’aurez compris, si les transgenres restent invisibles en Europe, les États-Unis ont mis en place différentes solutions pour tenter d’aider cette frange fragile de la population. Il est possible de prescrire à ces jeunes, dès l’âge de 10 ou 12 ans, des médicaments qui bloquent la puberté. Cette période durant laquelle apparaissent les signes sexuels les plus importants est souvent vécue comme un traumatisme. En retarder les signes offrent une période de réflexion pour les jeunes transgenres et leurs parents. Lorsqu’ils ont 18 ans, ils doivent faire le choix entre conserver leur sexe de départ, ou un traitement aux hormones qui favorisera leur changement de sexe.

 

Une clinique à Chicago est consacrée à la “dysphorie du genre” et accompagne psychologiquement les transgenres et leur famille. Elle aide des personnes comme Ryan, 12 ans, née dans un corps de garçon mais considérée comme une fille par sa famille et ses amis, Sade, 15 ans, qui cherche à devenir un homme mais doit trouver les moyens de payer les traitements… Des vécus différents, mais toujours la même constatation, celle de ne pas être né dans le bon corps.

 

La transidentité et le genre présentent des problématiques encore peu connues mais complexes. Peu acceptées car elles contredisent une réalité biologique établie (même si bien sûr le sexe biologique n’est pas toujours aussi simple que l’on ne pense), l’installation sociale d’une dissociation tranchée entre masculin et féminin depuis plus de 50 ans et des problèmes d’éthique majeurs comme la médicamentation de jeunes enfants.
Camille Barbry

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