HOTSOFT OU QUAND LE PLAISIR D’ÊTRE FILMÉ EST PUREMENT NARCISSIQUE


Publié le 9 janvier 2014

Je ne peux que m’incliner devant l’affirmation suivante : Hotsoft est une association qui s’arroge le droit de filmer la vie privée des étudiants.
Alors certes, l’on pourra critiquer la raison d’exister d’une telle association, la condamner, crier à son aspect pervers.  Cependant, qu’on le veuille ou non, Hotsoft reste une des associations les plus populaires de la Toulouse Business School.
Certes, à la vue du JT, nous apparaissons comme les victimes de ce système. Mais en réalité, nous en sommes bien plus les acteurs. Et ce plaisir d’en avoir le premier rôle reflète le désir profond et secret d’être porté un bref instant au centre de la scène.
Face à cette constatation, il y a ceux d’un côté qui continuent à suivre le système ; et ceux qui se rebellent.
Mais au fond, les rebelles ne font-ils pas preuve d’hypocrisie en critiquant un système qu’ils approuvent secrètement ?
Passer devant la caméra, le reflet d’un plaisir narcissique et pervers
Observez le comportement des étudiants qui se font filmer pendant les soirées. N’y retirent-ils pas un instant de plaisir jouissif ? Combien de couples sont fiers de jouer les amants quelques instants dans des émois quasi      « passionnels » sous le prétexte d’être sous le feu des projecteurs un moment?
Observons les couples (formés exceptionnellement pour une soirée). On peut y déceler deux catégories :
Il y a ceux qui se font filmer malgré eux. Alors face à la caméra, ils tourneront la tête pour cacher leur visage, ou se montreront violents par quelques injections pour exprimer leur mécontentement. En dépit de cela, les deux acteurs, conscients d’avoir été placés un instant au centre de l’attention, se précipiteront au JT pour vérifier qu’ils n’y apparaissent pas. Dans le cas contraire, ils se rebelleront et dénonceront la violation de leur vie privée. Mais avec hypocrisie. Car en réalité, en feignant les révoltés face à la diffusion de leurs petites élucubrations amoureuses, ils espèrent bien secrètement être affichés publiquement.
Et il y a ceux qui prennent un malin plaisir à se voir filmer. Ils se délectent alors d’un plaisir jouissif à mettre leur vie privée sur le devant de la scène, dans un caractère purement narcissique.
En effet, comment expliquer un tel engouement devant le grand amphithéâtre lorsque le Journal Télévisé est diffusé ? Comment justifier le fait que lorsque Hotsoft propose un véritable chantage sur sa page Facebook en réclamant 2210 like pour diffuser le JT du Swat, les étudiants s’inclinent et s’exécutent ? Il y a ici une forme de perversion malsaine à aller voir son ami vomir aux sorties de la boîte, son ennemie choper le mec qu’elle avait elle-même choper à la soirée précédente, des élèves prononcer des phrases totalement incompréhensibles.
Alors oui, Hotsoft incarne le monstre qui s’attaque à la vie privée des gens. Mais Hotsoft ne cessera pas d’exister pour autant.
Car même si l’on essaie de se donner bonne conscience en criant à l’irrespect, à la violation du droit à l’image, les étudiants ne cesseront pas d’éprouver un plaisir malsain, dans une tendance cathartique, face à la diffusion de ces images lors des JT.
Les rebelles feignent une indifférence qui ne les rend pourtant pas si indifférents
Alors certes, quelques rebelles dans cette masse voudront faire preuve de témérité en affirmant qu’ils ne souhaitent pas être filmés. Ou du moins le feront-ils croire. En effet, à la diffusion des JT, nous apparaissons comme de simples étudiants qui reproduisons un schéma toujours identique : s’animer  devant une caméra, embrasser le premier ou la première venue, mettre à nu une partie de son corps pour ne pas passer pour le peureux de l’école. Alors ceux qui réfutent ce schéma veulent créer la différence en dénonçant Hotsoft. Ainsi, ils cherchent à montrer que l’étudiant qui devient banal n’est pas celui qui reste incognito au JT, mais est désormais celui qui y passe !
Si devant ses amis, on crie haut et fort que l’on ne souhaite pas apparaître à l’écran, n’espérons-nous pas secrètement défiler quelques instants aux yeux de tous ?
Ainsi, l’hypocrisie qui fait qu’une telle association continue à exister provient de l’hypocrisie même des étudiants qui jouent le double rôle d’acteurs et de spectateurs.
         Je pense qu’au fond, même si nous critiquons cette association  au nom de la violation du droit privé, nous éprouvons intérieurement le désir d’être un instant placé sous le feu des projecteurs. La diffusion se révèlera pour certains comme un court laps de temps, où ils apparaîtront de manière floue au  second plan. Il sera pour d’autres un instant de  plaisanterie, où l’étudiant se verra balbutier tel un enfant de deux ans qui apprend à parler. D’autres encore y verront un instant de gloire, où ils prouveront à tous qu’ils ne sont pas des  ‘petit joueurs’.
Puis il y aura les rebelles, qui refuseront de se diriger au JT, préférant se préserver de passer devant de telles obscénités. Mais au fond, ceux-là ne se mentent-ils pas à eux-mêmes en faisant croire qu’ils sont insensibles au fait d’être au centre de la scène ? Ils cherchent à créer leur propre instant de succès en ne se dirigeant pas là où la masse afflue.
Car je crois que nous ressentons tous le besoin, ne serait-ce qu’un bref instant, d’être précipités au centre des attentions, d’une manière ou d’une autre, pour le meilleur ou pour le pire.
                           Meggan MARCOS

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